Guy Ramet, un artiste vivant
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Guy Ramet, un artiste vivant
... Qui a disparu le 21 avril 2012...
J'ai découvert récemment, et mesuré l'immensité (la stature en fait) de cet homme tout à fait hors du commun, dans un art qui, "ne passe pas trop sur le Net", étant donné que nous sommes là, dans une expression du corps, qui exige donc une présence physique, et au delà de cette présence physique, tout ce qui émane de cette présence ...
( et c'est cela justement qui est immense, qui fait réfléchir sur le sens de la vie, et surtout sur le sens de la relation humaine)...
Guy Ramet est en effet un grand spécialiste de l'expression corporelle sur laquelle il organisa des stages, ainsi que sur le travail du masque, des improvisations, des techniques du clown, du travail vocal et du travail du choeur.
Nous vivons des temps bien étranges à mon sens : d'un côté certes, de réelles avancées en matière d'art, d'écriture, de dessin (graphisme, peinture) ... Mais je ne sais si l'on peut en dire autant de la musique cependant... Et d'un autre côté, cette "omniprésence" de l'effet spécial, de l'apparence, de la mise en scène en vue de susciter de l'émotion, de l'émotion seule ou qui vise à produire de l'effet dans un but essentiellement marchand, de la contre façon, de la médiocrité, de la facilité et de l'immédiateté "sans rien derrière"... Et le Net est une sorte " d'océan" qui véhicule ces courants d'une culture qui à vrai dire n'en est pas une mais une culture de remplacement comme un tissu cellulaire de moindre qualité envahissant le corps peu à peu...
Guy Ramet est un artiste vivant, vraiment vivant.
Hélas, bien de ceux et de celles que l'on nomme "grands", que l'on fait "grands", en ces temps si décevants par moments ; ne sont pas, quand on y regarde de plus près, et que l'on commence à réfléchir... Des artistes vivants : ce sont plutôt des "bêtes de scène" ou de marchés ou de salons de ceci/cela, et ils sont des êtres morts dans la mesure où ce qui paraît vivant en eux, n'est que de la représentation, du spectacle...
Il n'y a, au fond - et c'est un thème sur lequel je réfléchis beaucoup- que l'expression du visage, du corps, du regard ; le son (et le ton) avec toutes les nuances de la voix, tout ce qui émane de soi et que l'on projette... Tout cela, on ne peut pas le faire sur internet...
Et cela peut prendre de la dimension, du sens, cela induit de la relation et cela se travaille ; c'est l'oeuvre d'une vie, se transmet, se partage, se moque de l'indifférence...
Je pense à certains rythmes de danse où le corps tout entier se meut, où le regard parle, où le visage parle, où le corps en se mouvant raconte, suggère, témoigne...
Un texte, même très bien écrit, de quelques lignes ou de quelques pages, en dit en fait moins qu'un regard, qu'un sourire, qu'un visage, que des mains, que le corps en mouvement... Déjà, ce "langage" là, celui du corps, du visage, de la main, est un langage "universel" (et en même temps d'une grande singularité) : il "fédère" sans cependant s'imposer par la force ou par le pouvoir que l'on peut avoir sur les gens...
« Avez-vous déjà observé, scruté le corps et le visage de votre enfant, de votre ami(e), de votre conjoint, de vos parents... ? Avez-vous remarqué qu'ils ont bien le corps de leur visage et le visage de leur corps et que tout cela va bien ensemble ? Non ? Alors mettez le visage d'Alfred sur le corps de Jules, celui de Jules sur le corps de Julie et vous verrez que rien ne va plus ! C'est un peu sur ce principe déconcertant du « rien ne va plus » que repose le travail du masque. En portant, par le masque, un autre visage, un étrange phénomène se joue : alors que l'on couvre son visage, on découvre son corps. Le porteur pensait peut-être se masquer/se cacher.
Mais le masque n'a pas pour fonction de (se) protéger (casque de boxe, de moto, de soudeur...) ; ni d'identifier (tous les uniformes ; ni de séduire (soirées et fêtes masquées et déguisées). Sous le masque, le porteur se voit révélé, renaître à lui-même et aux autres sous un jour nouveau et ce n'est pas le cas des dernières catégories évoquées. Porter un masque c'est donner à voir ce que l'on ne peut pas voir d'ordinaire : l'invisible. »
[Extrait de Théâtre « Art du Corps »
Vers une anthropologie du mouvement
Selon Guy Ramet]
Extrait de "La terre...L'eau...Le ciel...Le feu..."
Jacques Bury a lu lors des funérailles de Guy Ramet, ce petit texte, extrait du dernier spectacle écrit et dirigé par Guy, en juillet 2011 (avec Justine Dubos, Catherine De Keghel, Pascaline Gosuin, Julie Marichal, Christophe Dufour, Geert Neckebroek).
« Sais-tu que chaque fois que quelqu'un meurt dans le monde, à quelque heure du jour ou de la nuit, de froid, de faim, de travail, de maladie, de souffrance, d'assassinat ou de suicide, de cataclysme naturel ou de guerre, mais aussi d'amour, par amour, par empathie ou par passion, par idéal ou par folie..., chaque vivant dans ce marécage de tourments, est atteint dans son corps, son coeur et son esprit, par une minuscule blessure, une fragile meurtrissure, une petite mort. C'est en cela que nous sommes à la fois vivants et morts. Ou morts et vivants tout à la fois. Que nous sommes reliés... Et contre ces liens-là, tu ne peux rien. »
J'ai découvert récemment, et mesuré l'immensité (la stature en fait) de cet homme tout à fait hors du commun, dans un art qui, "ne passe pas trop sur le Net", étant donné que nous sommes là, dans une expression du corps, qui exige donc une présence physique, et au delà de cette présence physique, tout ce qui émane de cette présence ...
( et c'est cela justement qui est immense, qui fait réfléchir sur le sens de la vie, et surtout sur le sens de la relation humaine)...
Guy Ramet est en effet un grand spécialiste de l'expression corporelle sur laquelle il organisa des stages, ainsi que sur le travail du masque, des improvisations, des techniques du clown, du travail vocal et du travail du choeur.
Nous vivons des temps bien étranges à mon sens : d'un côté certes, de réelles avancées en matière d'art, d'écriture, de dessin (graphisme, peinture) ... Mais je ne sais si l'on peut en dire autant de la musique cependant... Et d'un autre côté, cette "omniprésence" de l'effet spécial, de l'apparence, de la mise en scène en vue de susciter de l'émotion, de l'émotion seule ou qui vise à produire de l'effet dans un but essentiellement marchand, de la contre façon, de la médiocrité, de la facilité et de l'immédiateté "sans rien derrière"... Et le Net est une sorte " d'océan" qui véhicule ces courants d'une culture qui à vrai dire n'en est pas une mais une culture de remplacement comme un tissu cellulaire de moindre qualité envahissant le corps peu à peu...
Guy Ramet est un artiste vivant, vraiment vivant.
Hélas, bien de ceux et de celles que l'on nomme "grands", que l'on fait "grands", en ces temps si décevants par moments ; ne sont pas, quand on y regarde de plus près, et que l'on commence à réfléchir... Des artistes vivants : ce sont plutôt des "bêtes de scène" ou de marchés ou de salons de ceci/cela, et ils sont des êtres morts dans la mesure où ce qui paraît vivant en eux, n'est que de la représentation, du spectacle...
Il n'y a, au fond - et c'est un thème sur lequel je réfléchis beaucoup- que l'expression du visage, du corps, du regard ; le son (et le ton) avec toutes les nuances de la voix, tout ce qui émane de soi et que l'on projette... Tout cela, on ne peut pas le faire sur internet...
Et cela peut prendre de la dimension, du sens, cela induit de la relation et cela se travaille ; c'est l'oeuvre d'une vie, se transmet, se partage, se moque de l'indifférence...
Je pense à certains rythmes de danse où le corps tout entier se meut, où le regard parle, où le visage parle, où le corps en se mouvant raconte, suggère, témoigne...
Un texte, même très bien écrit, de quelques lignes ou de quelques pages, en dit en fait moins qu'un regard, qu'un sourire, qu'un visage, que des mains, que le corps en mouvement... Déjà, ce "langage" là, celui du corps, du visage, de la main, est un langage "universel" (et en même temps d'une grande singularité) : il "fédère" sans cependant s'imposer par la force ou par le pouvoir que l'on peut avoir sur les gens...
« Avez-vous déjà observé, scruté le corps et le visage de votre enfant, de votre ami(e), de votre conjoint, de vos parents... ? Avez-vous remarqué qu'ils ont bien le corps de leur visage et le visage de leur corps et que tout cela va bien ensemble ? Non ? Alors mettez le visage d'Alfred sur le corps de Jules, celui de Jules sur le corps de Julie et vous verrez que rien ne va plus ! C'est un peu sur ce principe déconcertant du « rien ne va plus » que repose le travail du masque. En portant, par le masque, un autre visage, un étrange phénomène se joue : alors que l'on couvre son visage, on découvre son corps. Le porteur pensait peut-être se masquer/se cacher.
Mais le masque n'a pas pour fonction de (se) protéger (casque de boxe, de moto, de soudeur...) ; ni d'identifier (tous les uniformes ; ni de séduire (soirées et fêtes masquées et déguisées). Sous le masque, le porteur se voit révélé, renaître à lui-même et aux autres sous un jour nouveau et ce n'est pas le cas des dernières catégories évoquées. Porter un masque c'est donner à voir ce que l'on ne peut pas voir d'ordinaire : l'invisible. »
[Extrait de Théâtre « Art du Corps »
Vers une anthropologie du mouvement
Selon Guy Ramet]
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Jacques Bury a lu lors des funérailles de Guy Ramet, ce petit texte, extrait du dernier spectacle écrit et dirigé par Guy, en juillet 2011 (avec Justine Dubos, Catherine De Keghel, Pascaline Gosuin, Julie Marichal, Christophe Dufour, Geert Neckebroek).
« Sais-tu que chaque fois que quelqu'un meurt dans le monde, à quelque heure du jour ou de la nuit, de froid, de faim, de travail, de maladie, de souffrance, d'assassinat ou de suicide, de cataclysme naturel ou de guerre, mais aussi d'amour, par amour, par empathie ou par passion, par idéal ou par folie..., chaque vivant dans ce marécage de tourments, est atteint dans son corps, son coeur et son esprit, par une minuscule blessure, une fragile meurtrissure, une petite mort. C'est en cela que nous sommes à la fois vivants et morts. Ou morts et vivants tout à la fois. Que nous sommes reliés... Et contre ces liens-là, tu ne peux rien. »
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" Nous ne pouvons savoir! Nous sommes accablés d'un manteau d'ignorance et d'étroites chimères" [Arthur Rimbaud ]
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